Warren Buffett en 2017. L’« Oracle d’Omaha » est vénéré pour son rendement annuel composé d’environ 20% sur plusieurs décennies, une performance jugée quasi inégalée sur le long terme.
La réputation de Warren Buffett n’est plus à faire : depuis 1965, son holding Berkshire Hathaway affiche un rendement annuel composé d’environ 19,8% sur près de six décennies.
À titre de comparaison, le S&P 500 n’a rapporté qu’environ 10% par an sur la même période. Multiplier sa mise initiale par 140 en 59 ans – l’exploit de Buffett – semble hors de portée pour la plupart des investisseurs. Pourtant, certains investisseurs audacieux ont réussi à faire encore mieux, avec des stratégies parfois originales et sur des périodes d’au moins dix ans.
Partons à la découverte de ces surdoués de la finance qui ont surpassé la référence Buffett en termes de performance annuelle moyenne.

Des gestionnaires de fonds légendaires aux rendements hors normes

Plusieurs grands gestionnaires de fonds ont dépassé le fameux seuil de ~20% de rendement annuel sur de longues durées, même si leur nom est moins familier du grand public que celui de Buffett. Leurs résultats n’en restent pas moins impressionnants :

  • Peter Lynch – Gestionnaire du fonds Magellan chez Fidelity de 1977 à 1990, il a généré un rendement moyen d’environ 29,2% par an pendant 13 ans. Sous sa gestion, 1 000 $ investis en 1977 valaient 28 000 $ en 1990. Lynch combinait astucieusement style “value” et “growth” et prônait d’« investir dans ce que vous connaissez ». Son succès phénoménal – il a surperformé le S&P 500 qui tournait autour de 15% sur la même période – l’a poussé à prendre sa retraite anticipée à 46 ans, au sommet de sa gloire.

  • George Soros – Cofondateur du Quantum Fund, Soros a affiché environ 30% de rendement annuel moyen entre 1970 et 2000. Un investissement de 1 000 $ en 1970 valait ainsi 4 millions en 2000. Soros est surtout connu pour ses paris macroéconomiques audacieux : il « a fait sauter la Banque d’Angleterre » en 1992 en pariant contre la livre sterling, empochant 1 milliard de $ en une journée. Ses talents de spéculateur macro (devises, taux, matières premières…) lui ont permis de surclasser largement Buffett sur 30 ans.

  • Jim Simons – Ancien mathématicien devenu gestionnaire quant, Simons a fondé Renaissance Technologies et son célèbre fonds Medallion. Ce fonds quantitatif a réalisé en moyenne 66% de gain par an avant frais (39% net) de 1988 à 2019 – un chiffre ahurissant ! Pour donner une idée, 100 $ investis en 1988 valaient près de 400 millions $ trente ans plus tard. Personne ne sait exactement comment Medallion gagne tant d’argent – ses modèles informatiques ultra-secrets exploitent des micro-anomalies de marché. C’est la meilleure performance de l’histoire des hedge funds connue à ce jour, éclipsant totalement le rythme de Buffett sur la même période.

  • Stanley Druckenmiller – Disciple de Soros, il a dirigé le fonds Duquesne Capital durant trois décennies sans jamais enregistrer une année de perte, réalisant environ 30% de rendement annuel moyen sur 30 ans. Son fonds n’a jamais connu de drawdown annuel, un exploit de constance. Druckenmiller combinait stock-picking et paris macroéconomiques avec un sens du timing exceptionnel – il a notamment co-piloté avec Soros le trade contre la livre en 1992. Sa longévité et son sans-faute l’ont rendu légendaire à Wall Street.

  • Julian Robertson – Ce pionnier des hedge funds a fondé Tiger Management en 1980. Jusqu’en 1998, il a enregistré environ 32% de rendement annuel moyen sur 18 ans, transformant 8 millions $ de départ en 22 milliards $ à son apogée. Son fonds a ensuite fermé en 2000, Robertson estimant ne plus « comprendre » les excès de la bulle techno naissante. Il n’en reste pas moins que sur les années 1980-90, Robertson a rivalisé avec Buffett et formé toute une génération de protégés (les “Tiger Cubs”) devenus à leur tour de brillants gérants.

  • Michael Steinhardt – Figure emblématique des hedge funds des années 1970-80, Steinhardt a généré 24,5% de rendement annuel net de 1967 à 1995. Sur ces 28 ans, il a plus que doublé la performance du S&P 500 et même légèrement devancé le score de Buffett sur la période équivalente. Sa stratégie singulière mêlait investissement value à court terme, trading macro et vente à découvert – un cocktail agressif et unique, mais redoutablement efficace. Steinhardt prouve qu’il existait des hedge fund managers exceptionnels bien avant l’ère moderne, même si le grand public le connaît peu.

Chaque exemple ci-dessus illustre qu’un rendement >20% l’an sur une décennie ou plus est réalisable, mais souvent grâce à des approches non conventionnelles ou à un talent hors pair. Ces « légendes » de l’investissement ont exploité tour à tour stock picking expert, arbitrages quantitatifs, paris macroéconomiques ou concentration de portefeuille pour atteindre des performances inouïes.

Stratégies originales et anomalies exploitées par des investisseurs d’exception

Au-delà des grands noms, certains investisseurs moins connus du grand public ont bâti des track-records spectaculaires en capitalisant sur des anomalies de marché ou des styles très particuliers. Leurs parcours montrent qu’il existe de multiples chemins – parfois insolites – vers la surperformance :

  • Edward Thorp – Professeur de mathématiques, il est célèbre pour avoir d’abord battu le casino (il a inventé le comptage de cartes au blackjack) avant d’appliquer ses talents à Wall Street. Thorp a lancé dans les années 1960 l’un des tout premiers hedge funds quantitatifs, exploitant des inefficiences sur les options, obligations convertibles et autres arbitrages statistiques.
    Pendant plus de 30 ans, il a dégagé environ 20% de rendement annuel en moyenne sans quasiment jamais avoir un mois de perte ! Son fonds Princeton/Newport a en effet enchaîné 227 mois positifs sur 230, un record d’exception basé sur la rigueur mathématique et le contrôle du risque. Son succès discret (Thorp évitait la publicité) est la preuve vivante qu’en exploitant des anomalies de prix avec discipline, on peut vaincre le marché sur la durée.

  • Joel Greenblatt – Inconnu du grand public, Greenblatt est pourtant un héros pour de nombreux initiés de la Bourse. Avec son petit fonds Gotham Capital, il a affiché pendant 20 ans des retours stratosphériques d’environ 40% par an en moyenne. Pour mettre cela en perspective, 1 000 $ investis avec lui seraient devenus plus de 800 000 $ deux décennies plus tard ! Greenblatt a réalisé cet exploit dans les années 1985-2005 en se spécialisant sur des situations spéciales : spin-offs, fusions, restructurations – bref des niches où Wall Street n’allait pas, mais que lui exploitait méthodiquement. Auteur du fameux « Magic Formula », il a prouvé qu’une stratégie originale et concentrée pouvait produire des rendements bien supérieurs à ceux de Buffett, même sur une longue période, en sortant des sentiers battus.

  • Nick Sleep – Ce gestionnaire britannique est peu médiatisé, mais son Nomad Investment Partnership a affiché 20,8% de rendement annuel sur 13 ans (2001-2013), soit 3 fois la performance de l’indice mondial sur la période. Son approche était aux antipodes de la frénésie boursière : investir dans quelques entreprises exceptionnelles à très long terme. Sleep a notamment misé tôt sur Amazon, Costco ou Berkshire Hathaway, et pratiqué un « buy & hold » ultra-patient. Il a clôturé son fonds en 2014 pour partir vers des projets caritatifs, après avoir démontré qu’en concentrant son portefeuille sur quelques « compounders » de qualité et en les gardant des années, on pouvait dépasser Buffett en performance moyenne. Une anomalie exploité par… l’inaction et la patience, en somme !

Ces parcours atypiques soulignent qu’il existe de nombreuses façons de battre le marché. Qu’il s’agisse d’arbitrages quantitatifs sophistiqués, de paris contrariants sur des spin-offs négligées ou d’un investissement zen dans trois actions triées sur le volet, tous ces investisseurs ont à leur manière exploité des inefficiences ou un angle d’attaque original. Ils ont démontré qu’un investisseur individuel astucieux, avec la bonne stratégie au bon moment, peut rivaliser avec les plus grands.

Figures historiques ayant surpassé Buffett sur la durée

Si l’on remonte un peu dans le temps, on trouve également des figures historiques moins connues qui ont fait mieux que Buffett en termes de rendement composé. L’une des plus remarquables est sans doute Shelby Cullom Davis.

Ce dernier a commencé à investir sérieusement à 38 ans en 1947, avec une mise de 50 000 $ fournie par sa femme. Davis a choisi un créneau alors très peu glamour : les actions d’assurances. En appliquant inlassablement sa méthode « acheter des bonnes entreprises à bon prix et conserver » dans ce secteur, il a transformé ses 50 000 $ initiaux en 900 millions de $ à sa mort en 1994. Cela représente un rendement composé d’environ 23% par an pendant 47 ans –au-delà du 20% de Buffett.

Shelby Davis est souvent cité comme “le milliardaire oublié” : extrêmement frugal, prenant peu de risques inutiles, il a accumulé patiemment une fortune colossale sans fanfare, au point que le grand public ignore souvent son exploit. Son succès illustre que même avant Buffett, il existait des investisseurs de long terme capables de surperformer durablement.

D’autres exemples historiques incluent les fameux « Superinvestors of Graham-and-Doddsville » chers à Buffett – des disciples de Benjamin Graham qui, dès les années 1950-70, affichaient des performances annualisées approchant ou dépassant 20%. Parmi eux on peut citer Walter Schloss ou Tom Knapp, qui bien que moins connus, ont montré qu’un stock picking value discipliné pouvait battre les indices de façon répétée sur des décennies.

Bref, l’histoire boursière regorge de ces talents méconnus qui ont, chacun à leur époque, surclassé le modèle Buffett.

Au-delà de la Bourse traditionnelle : crypto, private equity et autres marchés

Il n’y a pas que sur les marchés boursiers classiques que l’on trouve des rendements défiant l’entendement. Dans d’autres classes d’actifs, certains individus ont explosé la barre des 20% annuels – parfois de beaucoup – sur une décennie ou plus.

  • Cryptomonnaies : Le Bitcoin a offert à ses premiers adeptes des retours phénoménaux. Par exemple, les jumeaux Winklevoss (devenus célèbres via l’affaire Facebook) ont investi 11 millions $ en 2013 dans le Bitcoin – à l’époque où le BTC valait ~120 $ l’unité.
    Fin 2017, leur mise initiale dépassait 1 milliard $ de valeur, le Bitcoin ayant été multiplié par plus de 100× en quatre ans. Cela représente un rendement annualisé de l’ordre de 300% par an sur la période – littéralement hors norme.
    De même, le fonds Bitcoin lancé en 2013 par Dan Morehead (Pantera Capital) affiche une performance cumulée de 131 000% net sur 11 ans, soit un rendement composé d’environ 88% par an ! Les cryptos étant un marché très volatil, ces succès extraordinaires s’accompagnent d’une prise de risque élevée. Mais ils montrent qu’en ayant le flair (ou la chance) d’investir tôt sur un actif disruptif, on peut écraser les 20% annuels de Buffett.

  • Capital-investissement / Start-ups : Les investisseurs en private equity ou venture capital ciblent souvent des rendements élevés pour compenser le risque.
    Ainsi, Peter Thiel a réalisé l’un des coups les plus célèbres : en 2004, il mise 500 000 $ pour 10% de Facebook, alors naissant. Huit ans plus tard, à l’introduction en Bourse de Facebook, il revend l’essentiel de sa participation pour plus de 1 milliard $. Son pari initial a rapporté 2000× la mise en moins de 10 ans, soit un taux composé à trois chiffres par an – de quoi faire passer Buffett pour un investisseur « prudent » en comparaison !
    Autre exemple, le japonais Masayoshi Son (SoftBank) investit 20 M$ en 2000 dans Alibaba (startup chinoise alors inconnue) – une décision visionnaire qui vaudra environ 60 milliards $ lors de l’entrée en Bourse d’Alibaba en 2014. Là encore, le multiple de gain est spectaculaire (~3000×) et le taux annuel avoisine les 40-50% sur 14 ans.

    Dans le monde du capital-risque, ce type de performance n’est pas monnaie courante, mais n’est pas unique : les premiers fonds de Sequoia Capital ou Accel Partners qui ont financé Apple, Google, ou Amazon ont généré pour leurs investisseurs des rendements annuels largement supérieurs à 20%.
    Le private equity plus traditionnel (rachats d’entreprises matures) a aussi ses champions : certaines firmes de LBO ont affiché sur plusieurs décennies des IRR au-delà de 25-30%. Ces succès illustrent qu’en dehors des marchés cotés, il est aussi possible – via l’investissement non coté, les startups technologiques, ou d’autres actifs alternatifs – de battre la performance de Buffett. Évidemment, ces gains élevés s’accompagnent souvent de risques tout aussi élevés, d’une moindre liquidité, et parfois… d’une bonne dose de patience.

En conclusion, dépasser le rendement légendaire de 19,8% de Warren Buffett n’est pas impossible – nous venons de voir de nombreux investisseurs qui y sont parvenus.
Aucun de ces parcours n’enlève le mérite de Buffett, dont la prouesse est d’avoir tenu ~20% l’an sur plus de 50 ans avec un capital colossal – ce qui est peut-être encore plus difficile. Néanmoins, pour les investisseurs en quête d’inspiration, ces exemples démontrent qu’il existe plusieurs façons de « faire mieux que Buffett ». Que ce soit grâce à un talent exceptionnel, une stratégie originale ou une conviction forte, certains ont réussi ce que certains croient impossible : battre le maître sur la durée.

Références :

  1. Long-Story | L’art de l’investissement selon Warren Buffett : l’équilibre subtil entre analyse financière et psychologie
  2. Peter Lynch: The Value of a Long-Term View
  3. George Soros Trading Strategies: Backtest, Setup, and Performance Analysis
  4. Wise Words from Jim Simons
  5. Medallion Fund: The Ultimate Counterexample?
  6. Stanley Druckenmiller
  7. Billionaire hedge fund manager Julian Robertson dies at 90- spokesman
  8. Michael Steinhardt – In His Own Words
  9. Learning from Ed Thorp
  10. Special Situation Investing Classes at Columbia University Business School
  11. Shelby Davis: An Unknown, Great Value Investor
  12. Winklevoss Twins Are Bitcoin’s First Billionaires
  13. Pantera Capital’s 1000x Bitcoin Fund: A Decade of Success
  14. Facebook’s first big investor, Peter Thiel, cashes out
  15. Masayoshi Son made $72 billion betting on Jack Ma’s Alibaba. Now he wants to do it again with AI.
Cédric Tempestini

Cédric Tempestini

Pour ceux qui ont de l’argent. Deal Hunter, Investor, Serial Entrepreneur, BA, Author

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